«Suicide assisté, la loi peut-elle s’affranchir de la morale ? »: Un nouvel exemple de la faillite de France Culture !

"Les Nouveaux chemins de la connaissance" par Adèle Van Reeth d’un débat enregistré le samedi 25 janvier 2014 en public depuis le grand amphithéâtre de la Sorbonne avec comme « invités » :
-André Comte-Sponville, philosophe, membre du Comité National Consultatif d'éthique
-Marie de Hennezel, psychologue Essayiste Auteur en 2007 du rapport "La France palliative"
-Jean-Cassien Billier, maître de conférences de philosophie politique et morale à l'Université de Paris IV Sorbonne

Je voudrais d’abord  citer ici (en exergue) un des tous premiers commentaires sur le site de l’émission qui m’est apparu d’une extrême acuité et justesse de vue :
« Aurélie 31.01.2014
J'ai du mal à n'entendre dans ces émissions autre chose que du commentaire de fait de société, limite bistro, qui commentent, commentent, commentent...
Quid de la culture? Nous n'apprenons rien. Il faudrait sortir de cette logique de journalistes qui consiste à considérer que tout ce qui est hors-actualité n'a aucun intérêt. La culture n'est pas le commentaire d'actualité. »
Je souscris pleinement  et souligne la dernière phrase car elle est une critique, lapidaire et imparable, de ce qu’est devenue France Culture confrontée  à sa vocation.
Je ne me suis pas ici senti convoqué à un débat (d’ailleurs comment matériellement le pourrais-je ?), ni même à y assister, mais juste invité à une sorte de divertissement philosophique, susceptible, il est vrai de me faire réfléchir, mais en aucune manière de m’impliquer réellement dans la problématique abordée. Bien au contraire je me suis senti  immédiatement tenu à distance par la mise en scène surannée du collège des « magisters », du présentateur et du public (le peuple ?) dont la présence ne se manifeste que par ses applaudissements  (immédiatement jugulés par le « meneur de jeu »…., Martin Legros).
Ce dernier, en définissant dans sa  « looongue »  présentation le cadre de l’exercice, va même, en la clôturant, très étonnamment, proclamer son inutilité puis qu’il annonce d’emblée qu’il n’est pas ici question de « positions dogmatiques pour  ou  contre  » (ce qui va cependant être le cas…)   mais de constater que nous (eux) sommes « confrontés à de l’indécidable » et  « comment nos valeurs vacillent face à….l’inextricable » (désolé pour l’approximation  les propos étaient un peu confus…). Mais alors si c’est inextricable et indécidable pourquoi débattre ?      
Sans transition il va alors planifier la séance en trois parties : Commentaires des « cas » médiatiques, exposé professoral  de chaque invité puis en toute fin (et il ne lui  restera  que 2  minutes pour ce chapitre que seul Jean-Cassien Billier aura le privilège d’aborder…) La question éthique: Est-ce que notre condition humaine face à la mort  est en passe de radicalement changer?  Ce  qui, sur une heure d’émission, est un peu maigre pour la seule interrogation véritablement pertinente enfin abordée !
Passons très rapidement sur l’évocation des cas particuliers qui démontrent avant tout qu’il n’est plus possible, aujourd’hui, de « philosopher » sur un quelconque sujet sans le légitimer  par du pathos. Seule la médiatisation de victimes, dans des situations dramatiques extrêmes donc emblématiques, pousse à ce que l’on nomme bien à tort, le débat public et qu’il serait plus juste d’appeler le débat institutionnel.  Le champ politique se doit de répondre à l’émotion que suscitent  ces malheureux faits divers ce qui hypothèque toute réflexion et décision objective. On peut juste constater et déplorer que deux philosophes et une psychologue de renom se prêtent, sans aucun recul,  à un tel  jeu de dupes.
Excepté Jean-Cassien Billier sur les dernières minutes toutes ces interventions manquaient cruellement de prise de distance, semblaient même parfois directement issues d’expériences personnelles intimes et, bien que contradictoires, se succédaient sans provoquer la moindre controverse. Bien loin d’une confrontation d’idées et d’une réflexion collective nous, dans la salle et de l’autre côté du poste, avons été balloté entre le plaidoyer et la péroraison, emporté parfois vers des digressions plus qu’hasardeuses comme celle de Comte-Sponville sur la peine de mort que je ne peux éviter, ici, de dénoncer.
Voici  en quelques « enchainements » ce qu’il nous dit après avoir fustigé et raillé (à juste titre) le « tu ne tueras point de l’église Chrétienne », mais sans que l’on comprenne très bien où il voulait en venir:
«….Oui, mais la peine de mort, on est contre… Moi je dis : Ca dépend des cas,….Il faut  arrêter avec le politiquement correct….moi je refuse de  donner tort au tribunal de Nuremberg …Point barre ! Ils ont condamné des nazis à mort, or à mon avis ils n’en ont pas condamné assez !  Même si on n’est pas d’accord avec moi, personne ne conteste le droit au tyrannicide, personne (ou presque personne [vous apprécierez !] ne conteste qu’il y ait des guerres justes…On ne va, quand même, pas donner tord aux résistants qui ont tiré sur des allemands !……En gros, le plus souvent, il ne faut pas tuer mais il comporte d’évidentes exceptions or la plus évidente de ces exceptions c’est l’homicide de soi-même….»…
Je dois préciser que, si en l’entendant, j’avais déjà éprouvé  un sentiment d’irréalité, une fois retranscrit ici, ce discours me stupéfie ; et à plus d’un titre !
D’abord, le style et la rhétorique qui laisse un peu rêveur,… et sceptique sur sa légitimité d’intellectuel-philosophe de renom. Mais bien plus grave son égarement théorique (dissimulé, il est vrai par la tonalité catégorique et péremptoire du discours…Il faut l’entendre !) est tout à fait saisissant. Dois-je rappeler qu’il est censé argumenter sur le droit à l’euthanasie et le droit au suicide et que pour justifier ce dernier (qui n’en demandait pas tant et, pour le coup, jamais contesté !) il en vient (sans s’en rendre compte…?) à remettre en question l’abolition de la peine de mort. C’est sur France Culture,… et la salle d’applaudir !
De telles dérives venant de ceux qui sont censés nous servir de référent ouvrent des abîmes de perplexité. Car, et Badinter ne me démentirait pas, entrouvrir la porte à quelques exceptions, aussi apparemment justifiés soient-elles, remet en question le principe d’universalité qui la fonde. Si l’on peut assassiner un tyran, qui n’a d’ailleurs peut être jamais tué lui-même, pourquoi s’en priver en face d’un tueur d’enfant… !? Quant aux guerres justes....!?
Finalement je m’en tiendrai là, déterminé à produire par ailleurs un contre discours * s’efforçant de sortir de cette exhibition d’idées reçues….

 

Le 12 février 2014
Singulier.eu

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*Euthanasie ! Un débat sans objet !